Le lendemain du Glacier Noir, j’ai fait un bout de la randonnée du refuge du Pelvoux avec un de mes voisins de camping anglais, mais la chaleur et mon genou fatigué par la descente de la veille, nous ont fait stopper un peu avant l’arrivée. On a d’ailleurs croisé uniquement des gens qui redescendaient avant d’avoir atteint le refuge, eux aussi chassés par la chaleur écrasante du jour. Je n’ai pris aucune photo, étant visiblement incapable de marcher sous le cagnard, parler anglais et penser à prendre des photos en même temps… Comme quoi l’évolution à ses limites et moi les miennes!

Le dernier jour à Ailefroide j’étais partie pour ne rien faire et me reposer avant le départ vers le sud du massif. Finalement, mes nouveaux voisins me proposent de venir grimper avec eux, à l’ombre des parois. Je n’ai pas enfilé de baudrier depuis 10 ans et je n’ai rien d’autre que mes chaussures de rando, ça promet.

Je les rejoins en début d’après midi sur un bout de paroi de l’autre côté du torrent. Le défi du jour consistant donc à ne pas se vautrer, tout en ressortant mon niveau d’anglais des tiroirs. Aucune chute à déplorer, bien que grimper en chaussures de randonnée, c’est un peu comme faire du vélo avec des palmes, c’est possible mais c’est pas top. Mon niveau d’anglais l’emporte sur mon niveau d’escalade, ce qui est plutôt normal en somme. Maintenant il ne tient qu’à moi d’y remédier à force de patience et d’arnica ^^. Après une belle après midi à crapahuter à l’ombre, nous terminons la soirée dans ce qui semble être un peu devenu mon QG local, avec une bière fraîche, un repas chaud et une bonne ambiance.

Au moment de régler la note je découvre qu’une consommation m’était payée d’avance depuis la veille grâce à un mécène parti regagner le sud 😉 . C’est ce qui s’appelle partir sur une note positive! (Merci encore pour la belle surprise!)

Le matin je traîne avec mes nouveaux acolytes autour d’un petit dej’ amélioré, carrément luxueux comparé à ma floraline à base de lait en poudre mal dosé. Bref, c’est un peu Byzance ^^ Entre croissants, thés & cafés, recharge de batteries, lecture et déchiffrage de cartes, les heures passent et en début d’après-midi, il est finalement temps pour eux d’aller grimper et pour moi de décoller. Quand on se sent bien dans un endroit d’adoption, il faut trouver la motivation pour s’arracher à sa nouvelle zone de confort. Les au-revoir passés, je remballe mes affaires avec l’entrain d’une loutre sous prozac.

Le pouce en l’air au bord de la route je me demande un peu où je vais et ce que je fais là. Pas le temps de tergiverser, un camion s’arrête et j’embarque avec un guide de moyenne montagne direction L’Argentière. Je monte ensuite dans la voiture bien remplie d’une fille au large sourire, qui me conduira jusqu’à Chorges (53Km). Le trajet passe en un éclair au fil des sujets de conversations variés qui s’enchaînent avec décontraction. Je me rappelle alors pourquoi il est si important de savoir la quitter cette fameuse « zone de confort ». À Chorges, je m’arrête manger un bout, vu que mon croissant du matin en bien loin derrière moi. Deux voitures plus tard, me voilà à Réallon (village). Je rejoins alors le camping. Celui-ci ferme le soir même mais je peux quand même rester squatter quelques jours, parfait. Clairement, au niveau de l’ambiance c’est pas Ailefroide. Il n’y a que des vieux en camping-cars qui me reluquent comme l’attraction du coin fraîchement débarquée. Bienvenue au zoo. J’aurai dû acheter des cacahuètes.

Je pose ma tente sous le regard insistant d’un des vieux qui va jusqu’à décaler sa chaise d’un bon mètre derrière son gros camping car, pour pouvoir continuer à épier mes moindres faits et gestes. Je pique ensuite une tête, toujours épiée par le vieux, visiblement étranger à tout concept de respect de l’intimité. Dépitée, je pars en quête de réseau pour donner des nouvelles à mes proches, qui eux s’éclatent en famille. Ça y est, il est là le moment moisi du mal du pays. En passant à côté du plan d’eau, sous le regard du vieux, j’aperçois un papillon en pleine détresse qui flotte à la surface. Je pars le repêcher et me pose au bord de l’eau avec mon compagnon d’infortune qui sèche dans le creux de ma main. À ce moment, j’entends le cri d’un aigle qui nous survole. Le temps s’arrête.

Le regard accroché à la silhouette aérienne qui sillonne le ciel bleu dans les derniers rayons du jour, j’oublie le vieux le relou et ma fatigue. Une fois sec, je repose mon volatile sauvé des eaux. Demain je partirai dans la direction du vol de l’aigle.

De retour à ma tente, un camping-car de jeunes Rennais s’est fièrement interposé entre moi et le mateur d’à côté. Triple hourra \o/ J’engage la discussion et au retour de ma douche, ils m’invitent à partager leur repas… Je passe finalement une super bonne soirée à papoter vadrouilles en tous genre avec mes hôtes, autour d’un repas chaud et des cartes de la région. Il faut connaître des coups de moins bien pour pouvoir apprécier les bons moments à leur juste valeur.

La nuit est claire, pas un nuage, juste les étoiles et le bruit du vent.

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